Environnement Lançonnais

OGM : Paris contre le MON810 et pour la nationalisation des autorisations de culture.

mardi 18 février 2014 par Alain KALT (retranscription)

Le 17 février 2014 par Marine Jobert

Pas de maïs OGM en France en 2014.

A un mois des semis de maïs, le gouvernement se dote (enfin) d’un bouclier anti-OGM : un arrêté interdisant le MON810 sur tout le territoire devrait entrer en vigueur dans trois semaines, auquel pourrait succèder une loi, en cours de discussion au Parlement. Mais le dossier se joue surtout à Bruxelles, où Paris tente d’imposer la « renationalisation » des autorisations de culture, aujourd’hui confiées à la Commission européenne.

Empêcher, à tout prix, la plantation du moindre semis de MON810 en France en 2014. C’est la mission que se sont fixés les ministères de l’agriculture et de l’écologie, qui ont annoncé ce 17 février la mise en consultation d’un projet d’arrêté visant à interdire la commercialisation et l’utilisation des variétés de semences issues de la lignée de maïs génétiquement modifié MON810, « pour faire face aux risques environnementaux liés à la mise en culture de ces variétés ». Date de clôture de la consultation : le 9 mars, soit quelques jours avant la date probable des premiers semis.

Une annonce qui intervient le même jour que la discussion au Sénat, en procédure d’urgence, d’une proposition de loi déposée le 4 février par le député socialiste Alain Fauconnier visant à interdire la mise en culture du maïs génétiquement modifié MON810 (mais qui englobe aussi celle de tous les maïs génétiquement modifiés). Un texte qui ne serait débattu que le 10 avril à l’Assemblée nationale, donc « trop tard par rapport aux semis », explique-t-on au ministère de l’écologie.

Motifs environnementaux

Le gouvernement fonde son refus de voir cultivés ces plants GM sur des considérations exclusivement environnementales. A savoir que « l’Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA) conclut que la culture de ce maïs présente des impacts sur l’acquisition de résistances par les insectes ravageurs, ainsi que sur la mortalité des populations de lépidoptères sensibles ». Le ministère fait également valoir que « des publications scientifiques postérieures à ces avis apportent des éléments scientifiques nouveaux mettant en évidence des risques liés au maïs MON810, en particulier le danger de propagation d’insectes ravageurs devenus résistants et le risque pour des organismes non cibles. »

Fragilité juridique

Stratégiquement, quelques questions se posent après l’annonce de ce projet de décret, qui n’était même pas évoqué encore la semaine passée. Car la date des semis de printemps n’est pas un secret d’Etat et les représentants des maïsiculteurs ne faisaient pas mystère de leurs prévisions de plantation dès le 15 mars, en raison des températures clémentes.

Pourquoi ne pas avoir anticipé la question il y a plusieurs mois, par exemple au moment des annonces par François Hollande, début août, de la « prolongation du moratoire » sur le MON810 ? « Peut-être pour ne pas risquer une annulation par le Conseil constitutionnel ou via une question prioritaire de constitutionnalité », s’interroge Christophe Noisette, de l’association Inf’OGM. En tout état de cause, ni l’arrêté, ni la loi ne sont appelés à une grande longévité sur le plan juridique. « Nous attaquerons ces deux textes et nous gagnerons », prévient Luc Esprit, le directeur général de l’association générale des producteurs de maïs, qui considère que le gouvernement gère ce dossier « à la petite semaine ».

Nationaliser les autorisations

Les semenciers, mais aussi la FNSEA, voient d’un mauvais œil se profiler la nouvelle réglementation communautaire sur les OGM, en discussion à Bruxelles depuis 2010. Et ce d’autant plus que Paris vient d’opérer un revirement majeur sur le dossier. L’objectif de la France serait désormais de « renationaliser au sein de l’Union les procédures d’autorisation de cultures d’OGM, actuellement arbitrées au niveau européen », a expliqué ce lundi Stéphane Le Foll, en marge d’une réunion à Bruxelles. Concrètement, il s’agirait de mettre un terme à un système où les décisions d’autorisation sont délivrées au niveau européen, puis éventuellement contrées tant bien que mal au plan national. « Nous proposons que la mise en culture relève de la subsidiarité [c’est-à-dire qu’elle soit traitée au plan national] », a complété le ministre français. Les producteurs d’OGM devraient alors « demander à chaque Etat une autorisation de mise en culture », a-t-il expliqué.

Les Etats maîtres chez eux

Un système qui pourrait s’apparenter à celui en vigueur pour les pesticides, où seule la substance active du produit est autorisée par Bruxelles, les Etats se réservant le droit de délivrer les autorisations de mise sur le marché pour les préparations après évaluation. « La Commission procéderait à l’évaluation sanitaire des OGM soumis par les producteurs et leur plantation serait autorisée Etat par Etat », fait valoir le ministère de l’agriculture. Une réunion des ministres de l’environnement de l’Union, compétents pour ce dossier, sera consacrée le 3 mars prochain à l’examen de la révision des règles actuelles d’autorisation des cultures transgéniques.

« La France est sur la même longueur d’ondes que la Commission quant aux objectifs poursuivis, mais ce sont les modalités juridiques de mise en œuvre qui ne nous conviennent pas », explique-t-on au ministère de l’agriculture. Les semenciers, tout comme la Fnsea, sont opposés à cette « subsidiarisation », qui serait selon eux source de « distorsion commerciale entre les Etats », explique Luc Esprit.

Négociations en cours

La France vient seulement de finaliser cette nouvelle position et sonde encore ses partenaires éventuels. Mais le contexte lui est relativement favorable au plan politique, au lendemain du vote de 19 Etats sur 28 contre l’autorisation de culture du TC1507[1]. Car l’émotion a été vive au lendemain de ce vote qui, loin de sceller le sort de ce maïs génétiquement modifié, pourrait ne pas empêcher son autorisation, en vertu d’une ancienne procédure. La Commission européenne, de son côté, presse les Etats de tirer au clair leurs intentions dans ce dossier ; la nouvelle position française pourrait y contribuer.


[1] Il s’agit d’une maïs génétiquement modifié pour produire un insecticide ciblant la pyrale du maïs et résister à plusieurs herbicides, développé par Pionner. L e processus d’autorisation a été relancé à la faveur de la condamnation de la Commission européenne par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pour « retard injustifié » dans la procédure d’examen de la demande d’autorisation de culture, qui datait de… 2001. Jusqu’ici non autorisé à la culture, l’OGM est toutefois autorisé à l’importation en Europe depuis 2006 pour l’alimentation humaine et animale.

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