Les champions de l’obésité (et ce n’est pas les Etats-Unis ! )
Les grands-parents des actuels habitants du Qatar étaient quasiment tous Bédouins, peuple guerrier et fier. Un dé à coudre de thé noir et quelques dates desséchées constituaient souvent leur seule pitance dans les immensités désolées du Moyen-Orient.
Cela n’empêchait pas ces hommes osseux mais musclés de sillonner à pied sans faiblir des montagnes de sable et de cailloux, sous un soleil à rôtir les scorpions. La vie a bien changé, aujourd’hui, au Qatar.
Les cours du pétrole, qui n’en finissent pas de monter, ont provoqué un déluge de dollars sur ce pays de la taille du Nord-Pas-de-Calais, qui borde le Golfe Persique. De maigres et secs, les habitants du Qatar sont d’abord devenus bien-portants, puis costauds, et maintenant... obèses, dans une proportion supérieure à celle du pays qu’on croyait imbattable, les Etats-Unis.
Malformations à la naissance
Selon de nouvelles études, environ la moitié des Qataris et un tiers des enfants sont obèses. (1) C’est deux fois plus qu’aux Etats-Unis, où 16 % des enfants sont obèses. (2)
Ce chiffre est dramatique. Car l’obésité acquise pendant l’enfance (avant l’âge de cinq ans) est en général définitive.
Le Qatar a également des taux très élevés de malformations à la naissance et de problèmes génétiques, des problèmes qui se sont aggravés ces dernières décennies, liés à la consanguinité.
Deux fois plus d’adultes qu’aux Etats-Unis y sont touchés par le diabète (17 %) , où on parle pourtant d’une grave épidémie de diabète.
Les Qataris contractent cette maladie 10 ans plus tôt en moyenne que les populations des autres pays, ce qui est terrible dans la mesure où le diabète provoque de l’hypertension, des paralysies, des maladies cardiovasculaires et des amputations. Le diabète rend aussi aveugle.
« C’est un problème très, très grave pour l’avenir du Qatar », juge Sharoud Al-Jundi Matthis, de la Qatar Diabetes Association.
Le pays le plus riche du monde
Le Qatar est le plus gros pays exportateur de gaz naturel du monde, et il est devenu officiellement, en septembre dernier, le plus riche, avec un PNB annuel par personne de 102 000 dollars par an.
Je ne sais pas si vous imaginez ce que cela représente. Ce pays est peuplé, à 60 %, d’ouvriers indiens, pakistanais et de bonnes philippines souvent employés dans des conditions abjectes. Cela veut dire que les 250 000 Qataris de souche, dont beaucoup de jeunes, se partagent des revenus de 181 000 milliards par an, soit 700 000 dollars par personne et par an, en moyenne !
A quoi consacrent-ils ces montagnes d’argent ?
J’aurais aimé vous répondre qu’ils s’en servent pour recruter de bons professeurs pour leurs enfants, acheter des livres, apprendre la musique, la littérature, la philosophie, la médecine, aménager de beaux jardins, cuisiner bio, protéger l’environnement...
Malheureusement, la plus grande partie passe dans les montres en or, les bagnoles, les écrans plats, les sucreries, les villas géantes avec piscines toujours plus énormes, et j’ai promis à ma mère de ne rien dire sur ce qui se passe parfois à l’intérieur pour « distraire » les occupants.
Luxe et maladies
La capitale, Doha, est passée de village en terre blanchie à la chaux au milieu des années 90 au statut de mégalopole hérissée d’hôtels de luxe, de gratte-ciels... et de fast-foods. La jeunesse, sans surprise, en raffole, et beaucoup ne connaissent même plus le goût du fromage blanc de chamelle et des galettes (pita) dont se nourrissaient leurs parents il y a quelques années à peine.
Les mains fébrilement accrochées à un commande de jeu vidéo ou à un smartphone, ils passent l’essentiel de leur temps dans l’air conditionné, à picorer des friandises, tandis que des bonnes, des cuisinières, des jardiniers s’acquittent des tâches ménagères.
Pendant ce temps là, leur santé – et leur vie – tombent en ruine.
« Tout le monde est au courant du diabète, au Qatar, mais le problème est qu’on ne fait que parler. Personne ne s’en occupe vraiment », explique Adel Al-Sharshani, 39 ans, chez qui un diabète a été diagnostiqué il y a plusieurs années. Son père et de nombreux amis ont aussi le diabète. « J’ai ignoré les conseils jusqu’à ce qu’il soit trop tard, et c’est ce que font aussi les autres. C’est dangereux. »
Comme beaucoup de Qataris, Adel a déclaré un diabète alors qu’il était encore jeune hommme, ce qui signifie que son risque de complications est plus important : « J’ai peur de perdre mes yeux, mes pieds. J’ai peur de perdre la vie », a-t-il confié à un journaliste venu enquêter sur le sujet. (3) Et il raison : une étude de cabinet McKinsey a prévu que le nombre de lits d’hôpitaux devra être augmenté de 100 % d’ici 2025.
Les femmes encore plus touchées
Lundi, nous parlions dans cette newsletter des graves carences de vitamine D dont souffrent les femmes musulmanes voilées. Ne s’exposant pas assez au soleil, elles sont en général très gravement carencées. Une étude récente a été réalisée en Arabie Saoudite auprès de 30 femmes ayant reçu le diagnostic de fibromyalgie. Leur taux sérique n’atteignait même pas 5 ng/ml, alors qu’il doit normalement être au-delà de 30, et si possible de 50. (4)
La vitamine D est synthétisée par la peau sous les rayons du soleil, surtout dans les zones de votre corps peu habituées à être exposées. Vivre enfermé dans une maison, et ne sortir que recouvert d’un voile épais, dont n’émergent, au mieux, que les mains et le visage, est une recette pour le désastre.
Elles ne risquent pas seulement l’ostéoporose et le rachitisme : le déficit de vitamine D, on le sait aujourd’hui, favorise également des maladies aussi diverses que la sclérose en plaque, la dépression ou le cancer du sein.
A Doha, la capital du Qatar, le gouvernement a récemment fait installer des parcours de santé dans les parcs de la ville, ainsi que des locations de vélo pour encourager la population à faire de l’exercice.
L’échec est total auprès des femmes du Qatar qui ne peuvent faire du sport et encore moins monter sur un vélo avec leur voile (souvent intégral), selon un reportage sur place mené par un journaliste américain. (5)
« Vous ne verrez pas de femmes Qatari faisant du vélo », explique Honey Stinett, une malaisienne interrogée par le journaliste. « La culture locale veut que les femmes du Qatar soient maintenues à l’intérieur. Elles ne font pas d’exercice et prennent beaucoup de poids. »
Mais il ne semble pas y avoir deprise de conscience dans les pays musulmans. Au contraire, la tendance depuis les années 80 est de revenir au voile intégral – avec les complications que cela implique pour mener une vie saine - y compris dans des pays où cela n’existait plus (Turquie, Egypte).
La richesse du jour au lendemain
Les Qataris sont devenus riches littéralement du jour au lendemain . Le taux de croissance dans les années 70 était de 1050 % par an, et a redoublé ces dernières années avec la flambée du pétrole.
Malheureusement, l’expérience montre qu’être riche, ça s’apprend.
Comme Jacques Ouille dans le film « Les Visiteurs », la tentation est grande, quand on a manqué de tout depuis l’enfance, de se jeter sur la nourriture et sur tout ce qui brille le jour où l’argent tombe du ciel.
Mais si user raisonnablement de son argent quand on est riche n’est pas courant, manger sainement paraît un privilège encore plus exclusif. Sans éducation à l’alimentation, ce sont les frites, les sucreries, les chips et le Coca-Cola qui prennent le dessus. Le tube digestif se dérègle, la glycémie s’affole, le cœur s’épuise, l’obésité gagne. Bientôt, c’est la mort elle-même qui montre son hideux visage.
Alors en ces temps de difficultés financières, saisissons l’occasion de reconsidérer notre mode de vie pour plus de santé, de simplicité, et de bonheur vrai. Faisons-le pour nous-mêmes... et pour les autres. Car un jour, forcément, des Qataris auront besoin d’aide et de conseils judicieux pour sortir de l’enfer doré, qui reste le fantasme de trop nombreux hommes modernes, pas assez sages.
Bien cordialement,
Jean-Marc Dupuis
Références :
(1) Source : International Obesity Taskforce
(2) Source : Wikipédia, article sur l’obésité, informations issue de Sciences & Avenir, http://fr.wikipedia.org/wiki/Ob%C3%...
(3) The Atlantic, novembre 2011.
(4) Abokrysha, Pain Med, 2012 Jan
(5) The Atlantic, novembre 2011
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Alain KALT (retranscription)
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