Lydia et Claude Bourguignon : L’alerte !
Triste constat sur les sols notre planète. Dégradation biologique, chimique et physique, la terre exsangue… Et si on commençait par là.
28/05/12
Par Jean-Marcel Bouguereau, éditorialiste
Pionniers du genre, leur réflexion intelligente sur l’état des sols apporte des solutions révolutionnaires pour calmer les ardeurs de notre suprématie dévorante.
Lydia et Claude Bourguignon sont, à leur manière, des prophètes modernes. Des prophètes de bonheur. Vous les avez peut-être vus dans l’excellent film de Coline Serreau, Solutions locales pour un désordre global. Avec Pierre Rabhi, Dominique Guillet, de Kokopelli, qui milite pour la biodiversité des semences, ils nous laissaient entrevoir, au-delà de la simple dénonciation d’un système agricole productiviste, de nouveaux systèmes agricoles alternatifs plus respectueux de la nature. Lydia et Claude Bourguignon ne mâchent pas leurs mots :
Le dernier refuge du Stalinisme, c’est l’agriculture : on nous affirme que sans engrais, ça ne poussera pas, que sans Monsanto et les OGM, on va tous mourir de faim. Alors que les OGM sont une catastrophe écologique, leur arrivée en Argentine a fait multiplier par quatre les doses de pesticides, les sols sont complétement morts... “.
Leur constat s’appuie sur trente ans d’expérience commune, d’abord au sein de l’INRA puis, lorsqu’ils se rendent compte que toute recherche agronomique indépendante est bridée, dans le laboratoire d’analyse des sols qu’ils ont créé, le LAMS. Leur modestie les empêche de se définir comme “médecins des sols“ mais c’est la définition qui leur convient le mieux. N’est-ce pas Anselme Selosse (des Champagne Jacques Selosse) qui disait : "Sans eux, je ne serais pas là où je suis, nous sommes nombreux à leur devoir une fière chandelle" ? La liste des domaines viticoles pour lesquels ils ont travaillé parle pour eux : Romanée Conti, Chaves, Beaucastel, Estoublon, Daumas-Gassac !
Mais avant d’en arriver là, ce fut une longue traversée du désert. Car il n’est jamais facile d’être à contre-courant. De prôner le bio, alors que c’est l’agriculture intensive qui est encouragée avec les soutiens des lobbies agro-alimentaires. Mais depuis la fondation de leur laboratoire, en 1990, ils ont multiplié les analyses de sol, plus de 10 000. Il faut les voir dans les tranchées qu’ils creusent au milieu des champs, entourés d’une grappe de paysans curieux de voir des scientifiques leur rendre visite et se crotter les bottes avec eux. “Nous, disent-ils, on s’abaisse à faire de la vulgarisation“. Et ils savent faire.
Leur argumentation est rodée par des centaines de conférences avec des agriculteurs dubitatifs devant ces défenseurs du bio. On les voit avec leur microscope présenter à ces paysans une coupe de leur sous-sol. Un sol souvent mort par une utilisation intensive des pesticides, du round up de Monsanto. Et mort également par l’usage frénétique des tracteurs et des charrues, ces “ armes de destruction massive“ qui, en tassant les sols, finissent par le rendre compact, imperméable aux eaux de pluies et évidemment dépourvue de toute ces insectes et de ces vers de terre qui permettent les échanges entre la surface du sol et les couches plus profondes. C’est la différence entre un sol mort et un sol vivant. Entre un sol soumis aux rendements intensifs et un sol qui respire. La terre est vidée de toutes ses matières nutritives.
Or, des solutions existent que Lydia et Claude expérimentent dans les campagnes, avec l’utilisation d’engrais naturels et des techniques de semis direct sous couvert qui ne sont révélées aussi efficaces que le labour. Pour les Bourguignon, nous ne faisons plus de l’agriculture mais de la pathologie végétale, en essayant de “maintenir vivantes des plantes qui ne demandent qu’à mourir tellement elles sont malades“. C’est que Lydia et Claude sont depuis longtemps convaincu des avantages du bio. En 1983 ils s’expatrient pour une année sabbatique aux USA. Ils découvrent les méfaits de la surconsommation : “Nous avons pris sept kilos chacun, et sommes rentrés en vitesse avant que les enfants ne deviennent complétement bouffis“, s’amuse Lydia.
Mais quarante ans plus tard, le diagnostic est alarmant : Pour Claude Bourguignon, 25 % des terres cultivables ont été stérilisées par l’agrochimie : “les sols lâchent. Partout. Il faut s’en occuper ! Sinon nous risquons de voir resurgir des famines à une échelle jamais vue auparavant dans l’histoire de l’humanité. Tous ce que les écologistes sérieux ont avancé depuis trente ans se vérifie. Nous jouons à l’heure actuelle l’avenir de notre civilisation.“
Alain KALT (retranscription)
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