Environnement Lançonnais

Anomalies dans la gestion du dossier du chlordécone.

samedi 28 août 2010 par Alain KALT (retranscription)

Anomalies dans la gestion du dossier du chlordécone. 27/08/2010 08:10 (Par Jean-Charles BATENBAUM)

Les scientifiques de l’Anses et de l’Inra ont réalisé deux rapport qui pointent les anomalies dans la gestion par le ministère de l’Agriculture de l’époque, du dossier du chlordécone.

Le chlordécone (ou Képone) est un produit phytosanitaire, pesticide, de la famille du DDT. C’est un polluant organique persistant (POP). Non biodégradable, sa DT50 est évaluée, suivant les conditions, de 3,8 à plus de 46 ans dans les sols.

De fortes suspicions de toxicité, alliées à cette persistance, l’ont fait interdire dans de nombreux pays (dès 1976 aux Etats-Unis). Les conséquences de son utilisation aux Antilles françaises jusqu’en 1993 ont fait la une des médias français en septembre 2007.

Aussi, le MDRGF se félicite que ces rapports pointent enfin les anomalies graves dans la gestion du dossier du chlordécone par le ministère de l’Agriculture ; notamment au niveau des procédures d’octroi des homologations, ainsi que dans la prise en compte de l’impact de l’utilisation de produits phytosanitaires sur l’environnement et la santé, peut on lire dans un communiqué de presse.

Par ailleurs, un des rapports dit que l’impact sur la santé et l’environnement du chlordécone avait été jugée secondaire à l’époque par les autorités face à la défense de l’industrie bananière française. Le livre « Pesticides, révélations sur un scandale français », écrit par François Veillerette et Fabrice Nicolino ne disait pas autre chose en 2007.

Le MDRGF regrette surtout qu’à ce jour l’homologation des pesticides dépende toujours du Ministère de l’Agriculture et de lui seul. Le rapport de Pierre Benoit Joly rappelle d’ailleurs à ce sujet que le Ministère de l’Agriculture « exerce un monopole de compétences, qu’il ne partage ni avec l’environnement ni avec la santé » et est « dans une situation de juge et partie ».

« Le MDRGF partage cette analyse critique du monopole du Ministère de l’Agriculture dans le domaine des pesticides et demande que l’évaluation et l’homologation des pesticides soit dorénavant réalisée sous l’autorité des trois Ministères concernés : Agriculture, Santé et Environnement, chacun de ces trois Ministères devant avoir un poids égal dans la décision finale. » demande François Veillerette, porte parole du MDRGF, dans un communiqué de presse.

L’AFSSA rapporte que des ouvriers exposés de manière chronique à ce produit (dont par contact) dans une usine en produisant aux États-Unis, ont été victimes de problèmes neurologique (irritabilité, tremblements, troubles de la vision, céphalées). Des effets toxiques sur le foie ont été observés, ainsi qu’une action de délétion de la spermatogenèse.

Une néphrotoxicité (atteinte rénale) et une délétion de la spermatogenèse ont été observées en laboratoires chez l’animal. Le chlordécone s’est par ailleurs révélé cancérigène chez l’animal (tumeurs du foie). C’est ce qui a motivé le Centre international de recherche sur le cancer à classer le chlordécone comme « cancérogène possible » pour l’homme, décision confirmée par une étude de l’ !INSERM et du CHU de Pointe-à-Pitre qui établit clairement le lien entre l’exposition à la molécule et le risque de cancer de la prostate.

Une élévation significative du risque de cancer de la prostate a également été récemment trouvée chez les hommes (de Guadeloupe, Martinique, Haïti et Dominique) ayant été, selon des analyses de sang faites entre 2004 et 2007, très exposés au chlordécone ; ceux ayant le taux sanguin le plus élevé avaient un risque plus de 2,5 fois plus élevé que les moins exposés. Dans les Antilles françaises, des taux sanguins de plus de 1 microgramme par litre (μg/L) sont trouvés chez plus de 20 % de la population étudiée. Le chlordécone était présent dans le sang de 68,7 % des malades et de 66,8 % des témoins à des concentrations médianes respectives de 0,44 et 0,40 (μg/l). Posséder certains caractères génétiques qui diminuent la capacité d’éliminer le chlordécone de l’organisme est associé à un risque accru de cancer de la prostate. Ceci laisse penser que le chlordécone puisse être un perturbateur endocrinien (féminisant, car mimant les œstrogènes, et que de manière générale, les œstrogènes-like sont sources de risque accru de ce cancer). L’étude a aussi montré que le risque était accru chez les hommes ayant vécu plusieurs années en métropole ou dans un pays occidental (risque multiplié par 5 pour des hommes ayant été exposés, ayant un antécédent familial de cancer de la prostate et ayant vécu dans un pays occidental ).

De plus, en Martinique, une analyse du risque de cancer (par zones) commandée par l’InVS a conclu à une « surincidence statistiquement significative du myélome multiple » chez l’homme adulte résidant dans la zone où le chlordecone a été le plus utilisé et serait encore le plus présent dans les sols (selon le BRGM).


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