Environnement Lançonnais

Le pire moyen de manger des œufs

lundi 18 mai 2015 par Alain KALT (retranscription)

Cher lecteur,

L’histoire de la vache folle et des « farines animales » a tellement écœuré les populations que même les poulets sont aujourd’hui étiquetés « élevés au grain », comme si c’était un gage de qualité.

Mais vous, cher lecteur, qui aviez des grands-parents à la campagne, ou qui avez eu des « leçons de choses » à l’école primaire, vous savez que le poulet n’a jamais été un animal végétarien, et encore moins un consommateur de maïs !

Le snack préféré de la poule, c’est un ver de terre dodu. Donnez-lui la couenne de votre jambon, elle sera au ciel !

Si vous lui en laissez la liberté, votre poule passera sa journée à gratter la terre à la recherche d’asticots, d’insectes. Si elle n’en trouve pas, elle picorera des herbes, des plantes vertes, des petites pousses, des racines, et, occasionnellement seulement, des graines.

C’est ce qu’il faut à une poule pour être heureuse, en bonne santé, et faire de bons œufs. Mais encore faut-il pour cela qu’elle ait l’occasion de sortir ! Poulets d’usine « élevés en plein air » Tout l’art du marketing est de jouer avec des expressions qui trompent le consommateur, sans en avoir l’air.

Ainsi, au supermarché, vous avez remarqué que vous pouvez acheter des œufs de poules « élevées en plein air ». Sur l’emballage, la photo d’une belle cocotte rousse picorant à son aise dans un pré d’herbe verte et grasse, par temps ensoleillé.

Or, voici ce qu’impose la législation pour avoir droit au label « élevées en plein air » :

« En journée, accès à un parcours extérieur en majeure partie recouvert de végétation (4 m2 de terrain par poule). »

Eh bien je prétends que seul l’expert en marketing détectera le piège caché sous cette formule.

Le débutant lui, même soupçonneux, s’inquiètera de ce que la poule ait droit à un accès, non à une prairie en herbe, mais à un simple « terrain » recouvert « en majeure partie » de végétation, le reste pouvant être des gravats ou du béton.

Il aura raison de s’inquiéter de ça. Mais en réalité, le vrai piège se trouve dans l’expression « accès à un parcours extérieur ».

Imaginez un hangar de 150 mètres de long en tôle ondulée, rempli de milliers de poules serrées comme des sardines. L’odeur est à vomir. Le bruit assourdissant. Les poules sont dans un état de stress, et d’agressivité tels, qu’elles se battent constamment, s’arrachant les plumes, se piquant les yeux et se griffant. Certaines ont des membres cassés. Vous ne pouvez vous aventurer dans ce hangar sans protections spéciales.

Sur le mur de ce hangar, trois plaques amovibles de 40 cm de côté, au ras du sol, qui sont retirées chaque matin par l’exploitant. Eh bien voilà : cela suffit pour que les poules puissent être déclarées avoir « accès » à un « parcours extérieur » !!

Techniquement, on pourrait imaginer qu’un certain nombre de poules, en effet, sortent. Le problème est que, les poussins étant nés eux-mêmes dans des hangars fermés, ils n’ont jamais vu la lumière du jour et ils ont peur de sortir ! Malgré « l’accès » vers l’extérieur, il se peut que la très grande majorité des poules « élevées en plein air » n’oseront jamais mettre le bec dehors.

Manger des œufs bio ?

Depuis 2004, tous les œufs vendus dans le commerce sont obligatoirement codés. Un petit tampon est appliqué sur chaque œuf comportant notamment un numéro :

- • 3 : poules élevées en cage, à éviter absolument.

- • 2 : poules élevées au sol, dans un hangar sans voir le ciel une seule fois de leur misérable existence. A éviter également.

- • 1 : poules élevées en plein air, nous avons vu ce que cela signifie. A éviter.

- • 0 : œuf bio. Les poules ont pu sortir, elles ont bénéficié d’abris et de végétation sur le parcours extérieur ; à l’intérieur du hangar, le nombre de poules est limité, avec une densité plus faible ; enfin, elles ont bénéficié d’une alimentation biologique à 90 % minimum.

Désolé de vous décevoir mais, pour moi, le chiffre 0 ne suffit pas. De plus en plus, se développent des installations industrielles respectant sur le papier les critères du bio et produisant les œufs par millions.

On reste très loin de l’élevage traditionnel des poules, seul à même de garantir l’œuf véritable de nos grands-parents, reconnaissable entre mille dans l’assiette. En 1950, la France comptait des millions de fermes en activité. Dans chacune d’elles, il y avait un poulailler, avec quelques dizaines de poules, qui bien souvent pouvaient se promener aux alentours librement. Tous les œufs consommés dans ce pays étaient produits de cette manière.

La seule bonne manière de produire des œufs est celle-là. Cela signifie pour vous que l’idéal est d’acheter vos œufs chez un producteur bio que vous connaissez, et qui exploite en effet un élevage de poule à taille normale. Rendez-vous dans une ferme près de chez vous, si vous habitez la campagne : le fermier vous fera visiter ses installations avec joie, s’il n’a rien à cacher.

Un bon éleveur de poules surveillera la nourriture de ses poules, s’assurera qu’elles ont de l’eau fraîche et propre, assez d’espace, une bonne ventilation dans le poulailler. Celui-ci devra être nettoyé très régulièrement.

Les poules bien soignées, elles, pondront des œufs dont le jaune est foncé. Grâce à leur bon système immunitaire, elles ne seront pas infectées par la salmonelle. Plus les œufs sont frais, plus le blanc est visqueux.

La meilleure façon de manger ses œufs.

Maintenant que vous avez acheté de vrais œufs, comment les préparer pour en conserver toutes leurs vertus nutritionnelles ?

La pire façon de manger des œufs c’est de faire comme dans les films d’action où le héros, après son entrainement physique à haute intensité, ingurgite rapidement un mélange de blancs d’œufs crus en se bouchant le nez, comme le fait par exemple Rocky Balboa dans la saga du même nom.

Rocky ne devait pas avoir été bien conseillé par son nutritionniste car les chercheurs ont montré depuis bien longtemps que la cuisson du blanc d’œuf (qui provoque une coagulation) augmentait nettement la biodisponibilité des protéines : en mangeant un blanc d’œuf cru vous ne digérez que 51% des protéines contre plus de 90% lorsqu’il est cuit ! (1) Mais il faut noter que c’est la coagulation du blanc, et pas spécifiquement la cuisson, qui augmente la digestibilité. C’est pourquoi on peut manger sans crainte des blancs montés en neige.

Le blanc d’œuf contient aussi de l’avidine, une protéine qui a la forme d’une pince et qui est capable d’attraper la vitamine B8 dans l’intestin, l’empêchant ainsi d’être absorbée. Les personnes qui auraient l’idée saugrenue de ne manger que des blancs d’œufs crus s’exposeraient alors à un risque très sérieux de déficit en vitamine B8 (2).

Une recette célèbre et généralement très appréciée à base d’œufs crus coagulés est la mousse au chocolat :

Prenez 6 œufs et 200 grammes de chocolat noir bio. Faites fondre le chocolat tel quel au bain-marie. Séparez les blancs des jaunes, et montez les blancs en neige. Lorsque le chocolat fondu a un peu refroidi, mélangez-y les jaunes. Puis ajoutez à ce mélange les œufs en neige, délicatement, sans les casser. Versez dans des ramequins individuels que vous laisserez une nuit au frigo. Vous pouvez bien sûr rajouter des fruits secs, mais ni sucre, ni farine, ni beurre ne sont nécessaires.

Je certifie personnellement que cette recette est diététique, quoi qu’en pensent les terroristes qui voudraient nous priver de tous les bonheurs de l’existence « pour notre santé ».

Les autorités vous conseilleront au contraire de faire attention en manipulant des œufs crus pour éviter la salmonellose. Mais ce risque concerne surtout les poules élevées dans de mauvaises conditions et, même dans ce cas, seul un œuf sur 30 000 est contaminé, ce qui fait que votre risque est vraiment faible.

Pas de quoi justifier de vous priver des bienfaits nutritionnels des œufs crus.

Toutes les cuissons ne se valent pas

S’il est relativement important de faire coaguler le blanc, il est encore plus important de ne pas faire cuire le jaune. En effet si vous êtes un fin gourmet (ou entrain de le devenir) et que vous mangez des œufs de qualité, leur jaune est riche en cholestérol, en acides gras oméga-3 et en lécithine. Tous ces corps gras bénéfiques pour la santé sont fragiles et s’oxydent à la chaleur pour finir par devenir toxiques.

La meilleure manière de les manger est au plat ou à la coque, cuit à faible température (80 °C). Nul besoin en effet que l’eau soit bouillante, puisque l’œuf coagule entre 70 et 80°C. Suivant la taille de votre œuf, 4 minutes environ suffiront pour obtenir la texture parfaite : votre blanc d’œuf doit être crémeux, votre jaune juste chaud et onctueux.

Mais vous pouvez aussi faire des œufs brouillés, au bain-marie. Le résultat final doit être une crème à peine plus épaisse que la crème Montblanc, et vous pouvez y ajouter toutes sortes d’ingrédients pour la parfumer : champignons ou épices bien sûr, mais aussi fines herbes et petits légumes.

Je vous garantis que, après quelques tentatives, cette façon de préparer les œufs brouillés est un pur délice.

Pour les passionnés de nutrition

Voici enfin quelques informations qui intéresseront les passionnés de nutrition, et qui expliquent pourquoi manger des œufs est bon pour la santé.

Les œufs bios produits de façon traditionnelle contiennent un tiers de cholestérol en moins, un quart de graisses saturées en moins, deux tiers de vitamine A en plus, deux fois plus d’oméga-3, trois fois plus de vitamine E et sept fois plus de béta-carotène que les œufs de poules en batterie.

De plus :

- • Les protéines présentes dans un œuf sont des "protéines complètes", car elles contiennent les huit acides aminés essentiels, c’est-à-dire ceux que l’organisme ne peut fabriquer lui-même. Les acides aminés essentiels sont en proportions équilibrées (c’est la raison pour laquelle les œufs sont utilisés comme référence pour l’évaluation de la qualité des protéines et des teneurs en protéines des autres aliments par la FAO et l’OMS).

- • Le jaune d’œuf de poule contient quant à lui de la lutéine et de la zéaxanthine, de la famille des caroténoïdes, des antioxydants, qui protègent notamment les yeux de la cataracte et de la dégénérescence maculaire liée à l’âge. Ces substances risquent d’être détruites par la cuisson. Riche en choline, le jaune d’œuf augmente et protège la mémoire. Sa teneur en acide folique est intéressante surtout pour les femmes enceintes afin de prévenir de la spina bifida (malformation de la moelle épinière du bébé). Il contient enfin du phosphore et du zinc.

Le jaune d’œuf ne fait pas grimper le taux de cholestérol

Dans les années 80, le jaune d’œuf fut injustement accusé de faire grimper le taux de cholestérol. Aujourd’hui, on sait que le taux de cholestérol sanguin a peu à voir avec le cholestérol alimentaire, car il est fabriqué par le foie, à partir du sucre.

N’oubliez pas que le cholestérol n’est pas un poison : chaque cellule de votre corps a besoin de cholestérol. Il contribue à fabriquer de la membrane cellulaire, des hormones, de la vitamine D, des acides biliaires pour digérer les graisses. Le cholestérol aide aussi à former des souvenirs et il est indispensable aux fonctions neurologiques. Le cholestérol de l’alimentation est votre ami.

De plus, de nombreuses études concluent que les œufs ne font de toute façon pas monter le taux de cholestérol. Par exemple, des recherches publiées dans le International Journal of Cardiology (1) ont montré que chez les adultes en bonne santé, manger des œufs tous les jours ne déclenchait ni d’effets négatifs sur les fonctions endotheliales, ni une hausse des taux de cholestérol.

C’est donc en toute tranquillité d’esprit que vous pouvez manger six œufs par semaine en essayant des recettes variées et délicieuses.

A votre santé,

Jean-Marc Dupuis

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Sources de cet article :

(1) Pieter Evenepoel, Benny Geypens, Anja Luypaerts, Martin Hiele, Yvo Ghoos, Paul Rutgeerts. Digestibility of Cooked and Raw Egg Protein in Humans as Assessed by Stable Isotope Techniques J. Nutr. 1998 128 : 10 1716-1722.

(2) DURANCE, T. D. Residual Avid in Activity in Cooked Egg White Assayed with Improved Sensitivity. Journal of Food Science. 56-3. 1750-3841.

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