Environnement Lançonnais

Le saumon transgénique autorisé aux Etats-Unis

lundi 11 janvier 2016 par Alain KALT (retranscription)

Le 20 novembre 2015 par Romain Loury

Un gène qui ne reste pas inactif

Aquabounty

Surnommé « Frankenfish » par ses détracteurs, le saumon atlantique AquAdvantage est devenu jeudi 19 novembre le premier animal génétiquement modifié (GM) autorisé pour la consommation humaine, en l’occurrence aux Etats-Unis, selon une annonce de la Food and Drug Administration (FDA).

Produit par la firme américaine AquaBounty Technologies, ce saumon est porteur d’un gène codant pour une hormone de croissance, normalement présent chez le saumon chinook (Oncorhynchus tshawytscha) de l’océan Pacifique. Une modification génétique qui confère à l’AquAdvantage une croissance deux fois plus rapide que son cousin sauvage, le saumon atlantique (Salmo salar).

Malgré la mobilisation de plusieurs associations de consommateurs, la FDA a annoncé jeudi autoriser sa consommation aux Etats-Unis, au motif qu’elle ne présente pas de risque pour la santé humaine. Début 2013, l’agence avait conclu à son innocuité pour l’environnement : d’une part l’entreprise a mis en place toutes les mesures pour empêcher leur évasion des bassins -basés à terre et non en mer-, d’autre part ces poissons transgéniques sont exclusivement femelles et théoriquement stériles [1].

Canada, Panama, Etats-Unis

Selon le plan de production dressé par AquaBounty, les œufs de saumon seront produits au Canada (sur l’Ile-du-Prince-Edouard), pays qui a donné son feu vert en novembre 2013 à cet élevage. Les œufs seront ensuit acheminés au Panama, où les saumons seront élevés en bassin jusqu’à maturité. Vivants, ils ne connaîtront donc jamais les Etats-Unis.

L’évaluation de la FDA recèle une particularité intéressante : n’ayant compétence à évaluer les impacts environnementaux que sur le territoire étatsunien, elle ne se penche pas sur ceux attendus en cas d’évasion des poissons au Canada ou au Panama.

Si elle fait référence à ces pays, c’est uniquement pour affirmer, d’une part, que les œufs ne pourraient pas survivre dans l’océan atlantique canadien –à l’état sauvage, ils éclosent en eau douce-, d’autre part, que les adultes ne toléreraient pas les températures marines panaméennes.

Une communication écolo

Pour mieux gommer la nature GM de son produit, AquaBounty a décidé d’angler sa communication sur les prétendus bienfaits environnementaux de son produit : menée dans des bassins à terre, ce type d’aquaculture ne pollue pas le milieu marin, et la qualité de l’eau y sera strictement contrôlée.

Croissant naturellement plus vite, l’AquAdvantage sera moins nourri qu’un saumon atlantique standard : son FIFO (« Fish In Fish Out »), à savoir la quantité de poissons, issus de la pêche minotière, nécessaire à la production d’un kg de saumon, sera réduit de 25%.

L’entreprise évoque aussi un bilan carbone 23 à 25 fois plus faible qu’avec le saumon élevé en Norvège ou au Chili, dans l’hypothèse où l’AquAdvantage serait produit à proximité de son lieu de consommation -par exemple une grande métropole américaine.

Or seul le Panama détient, pour l’instant, une autorisation de production d’individus adultes -ce que l’entreprise se garde bien de préciser sur sa page de présentation du produit. En cas de demande d’élevage aux Etats-Unis, ou dans tout autre pays, la FDA serait tenue de revoir son évaluation des impacts environnementaux.

Pas d’étiquetage obligatoire

Avant même son autorisation, plusieurs Etats, dont la Californie et l’Alaska, avaient fait part de leur opposition à ce produit, déclarant qu’ils n’autoriseraient pas son élevage sur leur territoire. « Plusieurs acteurs économiques, comme Subway, Whole Foods, Trader Joe’s ou Kroger, avaient décidé que même autorisés ils ne le commercialiseraient pas », rappelle l’association française Inf’OGM.

Quid d’un éventuel étiquetage GM ? Aux Etats-Unis, il n’est pas obligatoire lorsque le produit est nutritionnellement équivalent à la variété non-GM. Afin de mieux faire passer la pilule, la FDA a publié également jeudi des recommandations pour les industriels souhaitant étiqueter leur saumon ou leurs fruits et légumes (« GM » ou « non-GM »), uniquement sur une base volontaire.

C’es d’ailleurs le prochain cheval de bataille de l’association Consumers Union, qui dans un communiqué se dit « profondément déçue » de l’autorisation de l’AquAdvantage. « La décision de ne pas exiger un label ‘GM’ pour ce produit empêche le consommateur de faire son choix de manière éclairée », juge Michael Hansen, directeur scientifique de l’association.

Certes, l’étiquetage du pays d’origine est obligatoire en supermarché, ce qui pourra mettre la puce à l’oreille face à une mention « Panama », mais il ne l’est pas dans les marchés ou les restaurants. Approuvé en juillet par la Chambre des représentants, une loi visant à empêcher l’étiquetage GM dans tous les Etats (le « Safe and Accurate Food Labeling Act »), est en cours d’examen au Sénat. Parmi les Etats visés, le Vermont prévoit l’étiquetage obligatoire au 1er juillet 2016.

« Une goutte dans un seau »

Association très impliquée dans les questions alimentaires, notamment sur les additifs, le Center for Science in the Public Interest (CSPI) s’avère étonnamment tolérante avec les OGM. Selon elle, l’AquAdvantage, comparé à la consommation totale de saumon aux Etats-Unis, ne sera au mieux qu’« une goutte d’eau dans un seau ». Ce qui ne l’empêche pas de réclamer la transparence, que ce soit sur l’étiquetage ou sur un site internet.

Si l’AquAdvantage est le premier animal GM autorisé pour l’alimentation humaine, il en existe d’autres utilisés à des fins différentes, dont le GloFish et le Night Pearl, deux poissons d’aquarium luminescents. Quant au moustique Aedes aegypti OX513A, mis au point par la société britannique Oxitec (détenue depuis août par le groupe Intrexon, actionnaire principal d’Aquabounty), il a été autorisé au Brésil pour lutter contre la dengue et le chikungunya, et pourrait bientôt être utilisé en Floride.

[1] Le saumon AquAdvantage est triploïde, c’est-à-dire qu’il porte 3 copies de chaque chromosome au lieu de 2. Une propriété retrouvée également chez les huîtres triploïdes exploitées commercialement.

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