Environnement Lançonnais

L’extraction des gaz de schiste s’avère plus onéreuse que prévue.

mardi 28 juin 2011 par Alain KALT (retranscription)

Le 27 juin 2011 par Geneviève De Lacour

La bulle des gaz de schiste va-t-elle exploser ?

Des centaines de courriels d’énergéticiens, de géologues, de juristes et d’analystes économiques ont été décortiqués par The New York Times. Deux questions taraudent ces spécialistes : les compagnies pétrolières ne surestiment-elles pas la productivité et la taille des réserves de gaz de schiste ? L’article, publié le 25 juin, révèle la teneur de cette vision « de l’intérieur », et souligne le fait que cette industrie naissante n’est pas aussi confiante qu’elle n’en a l’air.

« L’argent des investisseurs coule à flots alors que les gaz de schiste sont intrinsèquement peu rentables », écrit un analyste d’une compagnie d’investissement à l’un de ses sous-traitants. « Rappelez-vous l’effondrement de la bulle Internet. »

L’exploitation des gaz de schiste est née aux Etats-Unis, mais son industrie ne possède que peu de retour d’expérience. En 2009, un ancien salarié d’Enron, célèbre société de courtage en énergie et en matière première qui fit faillite en 2001, écrit : « Je me demande quand ils vont avouer aux gens que ces puits ne sont pas ce qu’ils auraient dû être ». Et il ajoute que le comportement des compagnies pétrolières qui exploitent les gaz de schiste lui fait penser à celui d’Enron. « Ils veulent faire diversion pour cacher la réalité. »

Quelle est l’origine de tous ces courriels, ces documents publiés par The New York Times ? En fait, ils proviennent d’une demande de consultation de dossiers publics, ou bien ils ont été fournis au journal par des consultants et des analystes qui estiment que la perception du public en matière de gaz de schiste ne correspond pas à la réalité. Par mesure de protection, les noms et toutes informations permettant d’identifier ces sources ont été effacées, précise l’article du quotidien américain.

Les compagnies pétrolières possèdent des données de production pour plus de 10.000 puits. Fournies à l’administration, ces données indiquent clairement que la production n’est pas aussi importante que prévue. Ainsi, en ce qui concerne les trois principales formations géologiques productrices de gaz situées au Texas, en Louisiane et en Arkansas, seules 20% des zones considérées comme productives par l’industrie le sont effectivement.

Et pour les puits les plus rentables, ils sont souvent entourés de zones beaucoup moins productives ce qui fait que le cout du forage et de l’exploitation est parfois plus élevé que le bénéfice généré par la production. Autre élément important, le volume de gaz produit par les puits les plus productifs diminuerait beaucoup plus rapidement que prévu initialement. Leur rentabilité à long terme n’est pas démontrée.

« Ces puits s’essoufflent si rapidement que les opérateurs ont commencé une course contre la montre très onéreuse », écrit dans un courriel daté du 17 novembre 2009 Deborah Rogers, membre du comité consultatif de la Banque fédérale de Dallas à un géologue de Houston qui confirme ses propos. « Cela pourrait avoir de graves conséquences sur notre économie », explique-t-elle aussi.

Même les salariés des sociétés pétrolières doutent. « Nos ingénieurs prévoient une durée de production de 20 à 30 ans mais, selon moi, ces estimations mériteraient d’être prouvées », écrit dans un courriel daté du 17 mars 2011 et adressé à un analyste en énergie au niveau fédéral, un géologue de Chesapeake, la compagnie pétrolière dont l’un des puits a explosé récemment en Pennsylvanie. « En fait je reste assez sceptique quand on examine le taux de baisse dans la première année de production. Actuellement, aucun puits n’est véritablement rentable économiquement. »

Attirés par les chiffres affichés par les pétroliers quant aux réserves de gaz de schiste, les investisseurs se multiplient. Mais comment sont estimées ces réserves ? Il s’agit du volume de gaz que les compagnies estiment pouvoir atteindre grâce à leurs puits. Prédire ce volume est difficile. Les premières prédictions sont parfois en deçà de la réalité. En revanche, surestimer ces réserves demeure totalement illégal, car cela pourrait tromper les investisseurs. Pourtant des échanges rapportés par The New York Times montrent que les responsables des compagnies pétrolières s’interrogent souvent quant à l’honnêteté des chiffres avancés par leurs concurrents.

Ces pétroliers prédisent régulièrement que leurs puits pourront produire sur une période allant de 20 à 65 ans. Mais ces chiffres sont calculés à partir de très peu de données de base et nombre d’approximations.

Beaucoup de compagnies prédisent par exemple une chute de production après quelques années d’exploitation, puis une stabilisation. L’examen des données de production suggère que pour bon nombre de puits, la production ne se stabilise pas. Elle continue à chuter. « Avec ce genre de données, il est devenu de plus en plus difficile de nier le fait que la révolution des gaz de schiste est survendue », déclare Art Berman, géologue basé à Houston qui a travaillé pendant 20 ans au sein d’Amoco et qui est maintenant l’une des voix les plus critiques de cette économie.

La formation géologique de Barnett, située au Texas, qui possède le plus long historique de production, fournit le cas d’étude le plus intéressant pour prédire le potentiel des gaz de schiste. Les données indiquent que l’exploitation ne devrait plus être économiquement viable dans 10 ou 15 ans.

Et même si les responsables des compagnies pétrolières se veulent publiquement confiants quant à la rentabilité de l’exploitation des gaz de schiste, dans leurs échanges privés, ces mêmes dirigeants se montrent beaucoup moins optimistes, voire carrément cyniques. « Tout est une question d’argent », déclare un officiel de Schlumberger dans un courriel daté de juillet 2010 en parlant des forages en Europe pour lesquels certaines compagnies américaines ont décidé de tenter leur chance. Et quand il évoque la performance des puits européens, il déclare : « C’est vraiment minable ! ». Avant de rajouter : « Mais les opérateurs vont quand même se lancer, vont parler de potentiel et faire du fric. »

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