Environnement Lançonnais

Paul Watson, le capitaine des Sea Shepherd parle

vendredi 4 mai 2012 par Alain KALT (retranscription)

Le 01 mai 2012 par Geneviève De Lacour

Paul Watson à Paris.

Le Canadien est connu pour ses campagnes musclées sur les mers du monde entier, agissant pour la protection des océans et luttant notamment contre la chasse à la baleine. Paul Watson, rentrant tout juste de sa dernière campagne victorieuse contre les baleiniers japonais, a fait escale à Paris fin mars. L’occasion pour le Journal de l’environnement de rencontrer le capitaine des Sea Shepherd.

« Si les océans meurent, nous mourrons avec. Nous ne pourrons survivre sur cette planète avec un océan sans vie ».

Pour les Français qui ne vous connaissent pas, qu’est-ce que Sea Shepherd ?

J’étais un des co-fondateurs de Greenpeace mais je l’ai quitté en 1977 pour fonder la Sea Shepherd Conservation Society. A la différence de Greenpeace, nous agissons essentiellement pour la conservation marine. Notre mouvement est entièrement basé sur le volontariat. Il ne s’agit pas d’un mouvement de protestation mais plus d’intervention. Les règles et les traités pour la protection du milieu marin existent mais ne disposent d’aucun moyen pour intervenir au cas où ces règles sont transgressées. Nous agissons lorsque les gouvernements refusent d’intervenir. Notre action est agressive, mais non violente. Et en 35 ans, nous n’avons jamais été condamnés.

Quelles sont les campagnes actuelles, et vos succès ?

Sea Shepherd est surtout connu pour sa lutte contre la chasse à la baleine mais en fait nos actions vont de la protection du plancton jusqu’à celle des baleines. Nous venons de clôturer notre 8e voyage dans les eaux antarctiques pour empêcher les baleiniers japonais d’agir (voir JDLE). Et nous avons obtenu d’excellents résultats. Cette année, nous avons réussi à réduire leurs prises de 26%.

En ce moment, nous avons une campagne de protection de la côte aux Galápagos, avec les policiers équatoriens. Nous avons fourni aux garde-côtes équatoriens de l’équipement d’une valeur d’1 millions d’euros pour surveiller les côtes. Nous nous battons contre la pêche illégale, contre la corruption, contre la pêche aux requins pour les découpes d’ailerons, dans le sud du Pacifique. Mais nous sommes également présents en Méditerranée pour protéger le thon rouge.

Nos succès ? Nous avons réussi à saboter la flotte japonaise de baleiniers. Nous avons sauvé des milliers de dauphins au Japon. Entre 1979 et 1986, nous avons réussi à stopper la pêche à la baleine en Atlantique. L’été dernier, c’était au tour de la pêche aux requins-pilotes dans les iles Féroé, dans les eaux danoises.

Et vos prochaines campagnes ?

Fin novembre, des bateaux vont repartir en Antarctique. Mais avant cela, nous prévoyons de mener cet été une campagne pour protéger les requins aux iles Fidji et aux Tonga. Notre volonté est aussi de diviser par deux le nombre de dauphins pêchés dans les mers nippones d’ici deux ans.

Quel est le budget de la Sea Shepherd Conservation Society ?

Nous fonctionnons grâce aux donations individuelles. Notre budget annuel est de 20 millions de dollars américains (15 millions d’euros). Nos frais de fonctionnement sont plutôt minimes puisque notre budget représente environ 5% de celui de Greenpeace. Nous possédons un seul bureau à Washington que nous finançons. Le bureau qui est en Australie provient d’une donation. Mais nous ne faisons aucune campagne de collecte d’argent par mailing ou par envoi de courriers.

Qu’est-ce qui motive le choix de vos campagnes ?

Nous faisons une veille juridique dans le monde entier, nous surveillons la moindre violation de réglementation. Nous intervenons lorsque la violation est reconnue, mais aussi si l’intervention est tactiquement possible et enfin si elle est financièrement envisageable.

Nous n’avons que deux règles. La première : que personne ne soit blessé et la seconde : ne transgresser aucune loi. Vous pouvez avoir la sensation que nous transgressons certaines règles mais en fait ce n’est pas le cas. Les Sea Shepherd respectent toujours la loi.

Quelle tactique employez-vous lors de vos interventions ?

Nous pourchassons les bateaux. Du coup, ils ne peuvent pas charger les baleines capturées et ils ne peuvent pas en tuer de nouvelles. Nous essayons de les gêner et parfois même de manière humoristique. Nous balançons des bouteilles puantes sur le pont des baleiniers. Nous essayons de ne blesser personne. Nous envoyons des œufs de crocodile, ce sont des leurres qui explosent sur le pont, se gonflent et se transforment en crocodiles gonflables. Vous savez, l’humour est une arme très efficace !

Que pensez-vous de l’impact du tourisme ou de la pollution sur l’océan ?

Le tourisme fait beaucoup de dégâts, l’écotourisme aux Galápagos par exemple. La pression touristique y est forte. Le nombre de touristes y a augmenté de 50.000 en 1995 à 300.000 actuellement. Les autorités construisent des hôtels qui détruisent les habitats, les milieux naturels. Nous sommes aussi inquiets de l’acidification des océans, des déchets plastique. Nous essayons de trouver une solution pour collecter ces plastiques et les recycler. Autre sujet d’inquiétude pour nous, les coraux qui devraient avoir disparu d’ici 20 à 25 ans.

Quelles parties du monde sont-elles les plus affectées par la surpêche ?

L’Afrique est probablement la zone la plus touchée. La piraterie que nous voyons actuellement est certainement liée au fait que la pêche européenne pille les eaux africaines et pousse les populations locales à la pauvreté. La surpêche est un problème majeur. Il n’y a juste pas assez de poissons dans les océans du monde. Les prix du poisson grimpent et leur taille diminue. Les gens ne réalisent pas à quel point la situation est grave. Mais si les océans meurent, nous mourrons avec. Nous ne pourrons survivre sur cette planète avec un océan sans vie.

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