Au Japon, la chasse à la baleine profite de l’argent de la reconstruction
| 15.11.11 | 15h21 •
Mis à jour le 16.11.11 | 07h41
Tokyo Correspondance - Contestées, les activités japonaises de chasse à la baleine, officiellement présentées comme faisant partie d’un programme de recherche, suscitent de nouvelles critiques. De façon pour le moins inattendue, une partie du financement de la campagne 2011 dans l’Antarctique, dont la tenue a été confirmée le 4 octobre par le ministre de l’agriculture et des pêches, Michihiko Kano, sera assurée par des fonds prélevés sur le troisième budget supplémentaire consacré à la reconstruction des zones dévastées le 11 mars.
Pour établir le lien avec le séisme, le tsunami et la crise nucléaire, l’agence des pêches a rappelé qu’Ishinomaki, l’une des villes les plus touchées de la préfecture de Miyagi, est connue pour sa tradition ancienne de chasse baleinière. Elle abritait d’ailleurs un parc à thème sur cette activité, le Oshika Whale land, aujourd’hui détruit.
Fort de cet argument, l’agence a obtenu une enveloppe de 2,3 milliards de yens (21,2 millions d’euros). Or cet argent n’ira pas à la reconstruction d’installations, à l’achat de nouveaux bateaux, ni même au soutien des victimes. Il servira à "assurer la bonne exécution de la campagne 2011" qui doit débuter fin novembre ou début décembre et à "renforcer les moyens de lutte contre les opérations de harcèlement menées par les activistes hostiles à la chasse à la baleine". Plus précisément, l’enveloppe financera le déploiement de navires d’escorte des baleiniers. Car les campagnes annuelles dans l’Antarctique sont soumises à rudes pressions. L’organisation de protection des cétacés, Sea Shepherd mobilise chaque année plusieurs bateaux pour tenter de perturber l’activité des baleiniers. En février, Tokyo a été contraint de jeter l’éponge en suspendant la campagne pour raison de sécurité.
L’octroi de cette subvention a fait réagir les organisations de protection de l’environnement. Quatorze d’entre elles, dont Greenpeace Japan, ont adressé dès le 27 octobre une lettre ouverte aux autorités, les appelant à "consacrer cet argent aux victimes au lieu de le gaspiller dans une inutile mission de chasse baleinière". Le document, s’appuyant sur des chiffres officiels, précise que chaque campagne coûte environ 3 milliards de yens et se termine sur un déficit de 1,9 milliard de yens.
Moratoire international
L’annonce de la nouvelle campagne avait auparavant suscité le mécontentement de l’Australie. Canberra, qui a déposé une plainte contre Tokyo en 2010 auprès de la Cour pénale internationale, a rappelé son opposition "à toute forme de chasse commerciale, y compris aux activités pseudo-scientifiques du Japon".
La chasse baleinière fait l’objet d’un moratoire international depuis 1986. Mais des dérogations autorisent le Japon à s’y livrer sous couvert d’études scientifiques. Les Japonais ont pêché plus de 10 000 baleines depuis 1988. Le maintien de la chasse est aussi un enjeu de politique intérieure. Au point d’avoir convaincu les autorités d’autoriser une nouvelle campagne, mais au risque de voir le Japon perdre une partie du capital de sympathie suscitée par la catastrophe de mars.
Philippe Mesmer
Alain KALT (retranscription)
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