Environnement Lançonnais

Les grandes lignes du travail du GIEC

lundi 7 octobre 2013 par Alain KALT (retranscription)

La somme de près de 2.000 pages qui va commencer à être dévoilée officiellement ce vendredi 27 septembre à Stockholm (Suède) s’inscrit dans une série de trois rapports dont la publication s’égrènera pendant une année. Le premier est consacré à l’état de la science climatique, le deuxième portera sur « impacts, adaptation et vulnérabilité » (en mars 2014) et le troisième se focalisera sur les mesures à prendre pour atténuer le changement climatique (en avril 2014).

Ce cinquième rapport d’évaluation du Giec est le fruit de trois ans de travail. La sélection de ses quelque 850 auteurs –bénévoles- débute dès 2010, chaque Etat présentant sa propre liste de candidats ; la France a proposé environ 140 scientifiques, 35 seront retenus. Pour le groupe 1, les 300 auteurs sélectionnés dans 39 pays ont débuté assez rapidement la rédaction du rapport, multipliant les correspondances et se réunissant une fois par an pendant une semaine pour échanger. Le texte aura été revu par trois fois : d’abord par un collège d’experts, puis par des experts et les gouvernements, puis par les gouvernements seuls (en juillet 2013). La session plénière qui aura lieu cette semaine sera l’occasion de discuter « ligne par ligne, mot par mot » chaque expression, afin de pouvoir obtenir une approbation à l’unanimité des 195 Etats présents. « Mais les scientifiques auront le dernier mot », prévient Nicolas Bériot, secrétaire général de l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (Onerc), qui siègera à la plénière et accompagnera la délégation française. Il rappelle que le Giec n’a pas vocation à produire des résultats scientifiques nouveaux, mais qu’il réalise une synthèse des connaissances. Quelque 9.200 publications sont ainsi citées dans le rapport. Le travail du Giec est « policy relevant », insiste Nicolas Bériot, pas « policy predictive ». En clair, cela veut dire que le Giec ne dicte pas aux Etats les choix qu’ils doivent opérer, mais leur fournit les données nécessaires pour prendre des décisions.

Projections à moyen terme

Des nouveautés sont à attendre dans cette nouvelle mouture du rapport consacré à l’état de la science climatique, divisé en 14 chapitres. Notamment sur les nuages et les aérosols, « des éléments qui pilotent l’évolution du climat », détaille Pascale Delecluse, du laboratoire Météo France/CNRS. Un chapitre est consacré aux projections des modèles à moyen terme (30-50 ans), ainsi qu’à des prévisions à l’échelle décennale et multi-décennale et au changement du niveau de la mer. « Dans un effort de représentation graphique, des atlas et des cartes ont été ajoutés en annexe, pour montrer les tendances et les projections et pour quantifier les incertitudes », précise Pascale Delecluse. Le groupe 2 -« impacts, adaptation et vulnérabilité »- s’est penché sur la question des ressources en eau, des écosystèmes, de l’alimentation, des zones côtières et de la santé. « La question de l’impact du développement sur les villes, les océans, les ressources marines et l’acidification des océans a aussi été abordée », liste Sylvie Joussaume, du CEA/CNRS/UVSQ.

Végétarien pour le climat ?

Assez remonté, Jean-Charles Hourcade –CNRS/Ponts Paris Tech/EHESS- membre du troisième groupe de travail consacré aux mesures à prendre pour atténuer le changement climatique, s’est plaint que « personne ne lit le troisième rapport, mais que ça n’empêche pas qu’on dise des choses économiques sur le changement climatique ». Et d’insister sur la présence de notions éthiques dans ce rapport, « car il existe de très fortes différences culturelles entre Etats, entre générations et entre riches et pauvres ». A la frontière entre la description et la prescription, ce troisième rapport aborde un certain nombre de contraintes que les secteurs de l’énergie, des transports, de l’agriculture ou encore de l’urbanisation vont avoir à affronter pour faire face au mieux au changement climatique. « Faut-il devenir végétarien pour sauver le climat ? C’est dans le chapitre 11 ! Nous abordons des sujets sérieux qui intéressent la vie quotidienne », explique l’économiste.

Confirmer les tendances

La mouture 2013 sera-t-elle très différente de la précédente ? « Les connaissances s’accumulent et vont toujours dans le même sens », prévient Nicolas Bériot. « Aucun résultat n’est en contradiction avec les résultats précédents sur de grandes échelles de temps », confirme Pascale Delecluse. « Plus de chercheurs sont associés et de nouveaux concepts apparaissent. » Les décideurs sont-ils à l’écoute des scientifiques ? « Il faut prendre du recul », explique prudemment celui qui va justement piloter les négociations pour la France. « Depuis 30-40 ans, on assiste à une prise de conscience, à une compréhension des phénomènes. Les dirigeants sont parfaitement informés, mais il y a un découplage entre ces volumes énormes de résultats scientifiques et la mise en œuvre, la transformation du système technico-économico-industriel. »

(Source : par Marine Jobert - Le JDLE - le 27 septembre 2013)


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