Environnement Lançonnais

Les milliards du trafic de déchets électroniques

jeudi 3 septembre 2015 par Alain KALT (retranscription)

Le 13 mai 2015 par Stéphanie Senet

De 60 à 90% des déchets électroniques échappent aux filières de traitement et sont vendus ou enfouis en toute illégalité, révèle un rapport du Programme des Nations unies pour l’environnement (Pnue) publié le 12 mai.

On savait déjà que la production de déchets électroniques (DEEE) avait atteint un record l’an dernier, avec 42 millions de tonnes générées à travers la planète. Mais leur destin –hors recyclage- reste méconnu. Si environ 15% d’entre eux ont été traités dans une filière agréée, qu’advient-il du reste ? C’est à cette question ardue que les équipes du Pnue se sont attelées, concluant que de 60 à 90% des tonnages produits sont illégalement vendus ou enfouis. Soit l’équivalent de 62.000 à 95.000 Probo Koala en un an.

Leur rapport, intitulé « Waste crime-Waste risks », a été publié le 12 mai à Genève à l’occasion des conférences des parties des conventions de Bâle (sur le contrôle des mouvements transfrontaliers de déchets dangereux), Rotterdam et Stockholm. Elles actionnent le signal d’alarme alors que la production de DEEE devrait encore grimper pour atteindre 50 Mt en 2018.

Un business juteux

A environ 500 dollars la tonne (445 euros), selon l’estimation réalisée par Interpol en 2009, la vente illégale des déchets électroniques représente un business lucratif. Au total, la fuite des DEEE vendus, exportés ou enfouis illégalement représenterait donc une manne annuelle de 11 à 17 Md€. Mais c’est aussi une bombe à retardement, sur le plan sanitaire et environnemental, avec son poids de mercure, de plomb et de retardateurs de flamme bromés.

Des déchets cachés

Pour dissimuler ces déchets dangereux, la pratique la plus répandue consiste à les maquiller en produits de seconde main. Provenant d’Europe ou des Etats-Unis, ils sont largement envoyés en Afrique, et en particulier en Côte d’Ivoire, au Ghana, au Nigéria et en République démocratique du Congo. L’Asie représente la deuxième plate-forme la plus importante avec le Bangladesh, la Chine, Hong Kong, l’Inde, le Pakistan et le Vietnam. « Arrivés à destination, ils sont tout simplement jetés à la mer ou dans les ports », affirment les auteurs du rapport. Des pratiques généralisées par des organisations criminelles transnationales. « En raison du manque de statistiques et de contrôles, le secteur de l’élimination des déchets dangereux est une porte ouverte au blanchiment d’argent et à la fraude fiscale », ajoutent-ils.

Retour à l’envoyeur

Le rapport du Pnue émet plusieurs recommandations pour endiguer le phénomène. A commencer par l’élaboration d’une cartographie permettant d’identifier les routes, les déchets et les organisations concernées, une meilleure sensibilisation des gouvernements et des autorités judiciaires sur les risques encourus pour la santé humaine et l’environnement, et bien sûr un renforcement des lois et des contrôles. Plus original, le Pnue suggère d’organiser le retour des déchets illicites à leurs expéditeurs, et à leurs frais.

La lutte récente d’Interpol

La première opération d’Interpol visant le trafic de DEEE remonte à fin 2012. Lors de l’opération Enigma, 240 t de déchets d’ordinateurs et de téléviseurs ont été saisis. 40 sociétés ont par ailleurs été identifiées dans ce trafic traversant 7 pays européens et africains (Allemagne, Belgique, Pays-Bas, Royaume-Uni, Ghana, Guinée, Nigéria).

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