Les pesticides, ça commence à bien faire !
Le 29 juin 2012 par Geneviève De Lacour
La France, 1er utilisateur de pesticides en Europe
Bonne nouvelle pour les fabricants, beaucoup moins pour l’environnement : le marché français des pesticides a fortement progressé en 2011. L’annonce a été faite le 27 juin dernier par l’Union des industries de la protection des plantes. Une hausse que le lobby de l’agrochimie justifie par des conditions météorologiques particulièrement éprouvantes pour certaines cultures. Premier pays agricole européen, la France conserve la première place des pays utilisateurs de phytosanitaires. Des chiffres peu encourageants pour le plan Ecophyto 2018.
Comment atteindre les objectifs du plan Ecophyto -visant à réduire de 50% l’usage des pesticides d’ici 2018– avec de tels chiffres ? En 2011, les ventes d’herbicides ont grimpé de 17% pour contrer l’apparition des mauvaises herbes. Il faut dire qu’un printemps exceptionnellement chaud et sec a favorisé leur installation, notamment sur les betteraves. Les ventes d’insecticides ont, elles aussi, accusé une hausse de 11% pour pallier la pression parasitaire sur le colza, les céréales et la vigne et cela en raison de températures élevées.
Ces chiffres ont été annoncés mercredi 27 juin par l’Union des industries de la protection des plantes (UIPP) qui précise par la voix de son directeur général que le « tonnage de substances actives phytosanitaires vendues est en hausse de 1,29% en 2011 ». Jean-Charles Bocquet regrette néanmoins qu’« avec un chiffres d’affaires de 1,9 milliard d’euros, le marché (français) [soit] en hausse de seulement 5% comparé aux 15% d’augmentation dans l’Union européenne ». Cette augmentation du chiffre d’affaires s’explique par une hausse des prix mais aussi par la mise au point de nouvelles molécules, explique le directeur de l’UIPP.
L’arrivée sur le marché de nouveaux produits, par exemple le traitement des semences contre les ravageurs, a séduit les agriculteurs puisque les ventes bondissent de 7%, souligne l’UIPP. En revanche, les ventes de fongicides reculent de 10% pour la deuxième année consécutive, en raison d’une baisse de la présence de parasites sur la vigne et les céréales.
Et en 2012, la tendance pourrait bien se poursuivre. Le printemps humide a favorisé cette année la prolifération de champignons sur les céréales, notamment le blé.
Premier pays agricole européen, la France est aussi le plus grand utilisateur de pesticides. En 2010, avec un chiffre d’affaires de 1,9 Md€, la France précédait l’Allemagne (1,25 Md€), l’Italie (807 M€), la Grande-Bretagne (589 M€) et la Pologne (455 M€), selon les chiffres communiqués par l’UIPP.
Au niveau mondial, le marché des pesticides est en nette progression, +15% en valeur. L’Europe est la première région utilisatrice de pesticides (27,7% du chiffre d’affaires), devant l’Asie (26,4%), l’Amérique latine (23%), l’Amérique du Nord (19%) et l’Afrique (4%).
« Dans la plupart des régions du monde, nous avons des croissances supérieures à 10% car les agriculteurs sont encore en phase de développement, afin de produire plus pour nourrir leur population », souligne Jean-Charles Bocquet. Une forte progression enregistrée alors que la présence des OGM dans de nombreux pays est censée réduire l’usage des pesticides.
Sur 6 ans, entre 2006 et 2011, le chiffre d’affaires mondial a augmenté de 44,7%, passant de 30,4 à 44 Md$ (34,7 Md€).
Aux raisons météorologiques avancées par l’UIPP, l’association Génération futures répond : « Le lobby des pesticides, représenté par l’UIPP, met en cause les conditions météorologiques. C’était déjà le cas en 2007, ce sera très certainement encore le cas en 2012. Les conditions météorologiques font partie des facteurs à prendre en compte et seront toujours fluctuantes au gré des années ».
« En fait, cette hausse pointe surtout le manque total de volonté politique de pousser en profondeur un changement du système agricole qui conduit à l’immobilisme, à la reprise en main très nette de l’assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA) –et de ses représentants- et donc à un échec, à ce jour, du plan Ecophyto 2018 », poursuit l’association écologiste connue pour avoir pris la défense des agriculteurs victimes des produits phytosanitaires.
Générations futures s’interroge ainsi sur le manque de promotion de techniques alternatives à ces produits potentiellement dangereux. Et élargit le débat sur la réforme en négociation de la politique agricole commune (PAC). « Pourquoi la France n’est-elle pas plus agressive pour défendre un verdissement de la PAC au niveau européen ? Pourquoi la France continue-t-elle à demander des dérogations à l’utilisation de certains pesticides ? »
Et François Veillerette, porte-parole de Générations futures, de déclarer : « Nous comptons sur le nouveau gouvernement pour savoir prendre les mesures qui s’imposent dans les mois qui viennent pour mettre au cœur de ses politiques publiques la protection de la santé et de l’environnement, et la promotion de systèmes alternatifs respectueux de l’homme et de la planète ».
Alain KALT (retranscription)
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