Environnement Lançonnais

Les "9 limites du système planétaire"

samedi 16 avril 2011 par Alain KALT (retranscription)

Vendredi, 23 Octobre 2009 08:38 Emmanuel Delannoy Dans son article intitulé "Un espace sécurisé pour l’activité humaine", Johan Rockström et al propose d’identifier et de quantifier ce qu’il appelle des "limites planétaires" visant à empêcher l’activité humaine de provoquer des changements environnementaux non soutenables.

Il part du principe que la période de stabilité qu’a connu notre écosystème depuis 10.000 ans et qui est à l’origine du développement humain est mise en danger depuis l’avènement de la révolution industrielle avec, entre autres, l’utilisation massive des énergies fossiles et la progression de l’agriculture industrielle. Potentiellement irréversibles, les conséquences de cette activité humaine pourraient selon lui mettre un terme à la stabilité de l’écosystème planétaire pourtant censée durer encore plusieurs millier d’années s’il n’y avait pas eu de révolution industrielle.

D’où l’idée de poser des "limites planétaires", c’est-à-dire des niveaux-seuils appliqués à l’activité de certains sous-systèmes et processus biophysiques qui se définiraient par la valeur critique de certaines variables de contrôle telle que, par exemple, la concentration de CO2. On compterait ainsi 9 sous-systèmes et processus auxquels ces limites s’appliqueraient :

Ces 9 limites décrivent le « terrain de jeu » dans lequel l’humanité reste en sécurité par rapport à l’équilibre du système Terre. Si elles sont dépassées, les conséquences pourraient être catastrophiques pour l’Humanité, d’autant plus que des changements dans un sous-système peuvent augmenter le risque de se rapprocher d’autres limites pour d’autres sous-systèmes.

1 - le changement climatique

2 - le taux de diminution de la biodiversité

3 - l’interférence humaine avec les cycles azote / phosphore

4 - la diminution de la couche d’ozone

5 - l’acidification des océans

6 - la consommation mondiale d’eau douce

7 - les changements d’exploitation des sols

8 - la pollution chimique

9 - la pollution atmosphérique par les aérosols

Les limites ont été définies selon une approche « conservatrice » (risk-averse) et l’auteur précise qu’il reste un travail de recherche important pour valider et préciser les limites telles qu’elles ont été évaluées ici.

Johan Rockström nous alerte sur le fait que ces limites sont peut-être déjà sur le point d’êtres atteintes dans certains domaines tels que le consommation d’eau douce, les changements d’exploitation des sols, l’acidification des océans et l’interférence dans les cycles globaux du phosphore tandis que selon son analyse pas moins de trois processus ont d’ores et déjà dépassé le seuil d’alerte : le changement climatique, le taux de diminution de la biodiversité et l’interférence humaine avec les cycles de l’azote.

Concernant le changement climatique, l’auteur propose d’une part d’abaisser le seuil critique du taux de concentration en CO2 à 350ppmv (=partie par million sur une base volumique) contre un taux actuellement observé de 387ppmv, et d’abaisser d’autre part le forçage radiatif (=différence entre l’énergie radiative reçue et l’énergie radiative émise par un système climatique donné) à 1,0 Vm-2 contre une valeur actuellement observée de 1,5Vm-2. Il invoque trois raisons pour justifier la révision de ces seuils :

1 - les modèles d’évolution climatique sous-estiment selon lui la sévérité des changements climatiques à long terme en omettant d’inclure certains paramètres tels que la diminution des surfaces glacées ou les changements dans la répartition géographique des types de végétations ;

2 - la stabilité des grandes surfaces de glace polaire : il existe selon lui un seuil critique situé entre 350 et 550 ppmv ;

3 - l’alerte est déjà donnée par la fonte rapide de la mer de glace dans l’océan arctique, le retrait général des glaciers montagneux, la perte de masse des couches de glace du Groenland et de l’Antarctique ouest ainsi que l’élévation du niveau de la mer sur les 10/15 dernières années.

Concernant le taux de diminution de la biodiversité, l’auteur déclare que ce qui est à l’origine un processus naturel est multiplié par 100 et parfois par 1000 et ce essentiellement du fait des changements d’exploitation des sols ainsi que par la rapidité du changement climatique. Cette perte de biodiversité peut aussi interagir avec d’autres "limites planétaires" lorsqu’elle intensifie, par exemple, la vulnérabilité des écosystèmes terrestres et marins au changement climatique et à l’acidité océanique. Johan Rockström reconnaît qu’il est difficile de fixer avec précision une limite planétaire à la diminution de la biodiversité mais propose d’envisager comme indicateur un "taux d’extinction" 10 fois supérieur au taux naturel sous peine d’une érosion significative de la résistance globale de l’écosystème.

Enfin, s’agissant de l’interférence humaine avec les cycles azote / phosphore, il constate que les volumes d’azote et de phosphore essentiellement dus à l’agriculture moderne perturbent les cycles globaux de ces deux éléments importants. Ces gaz agissent notamment sur le forçage radiatif ainsi que sur les écosystèmes marins et lacustres. Il propose donc de fixer la limite planétaire de fixation humaine de N2 à 25% de sa valeur actuelle (soit 35 millions de tonnes d’azote par an) et de limiter le déversement de phosphore dans les océans à 11 millions de tonnes par an.

Johan Rockström affirme que toutes ces "limites planétaires" sont liées les unes aux autres, ce qui signifie que la transgression de l’une seule d’entre elles implique des risques pour les autres sous-systèmes et processus évoqués ci-dessus. Toutefois, elles représentent une nouvelle approche du problème permettant de définir des pré-conditions biophysiques d’un développement humain durable. En effet, pour la première fois il y a tentative de quantifier des limites au-delà desquelles le système planétaire perdrait la stabilité nécessaire à son bon fonctionnement et surtout au-delà desquelles la terre perdrait sa capacité à absorber l’activité humaine.

Tout en insistant sur la nécessité de recherches plus poussées en la matière, l’auteur met en avant le fait que l’approche repose sur 3 axes de recherches :

- L’échelle de l’activité humaine en relation avec la capacité de la Terre à la soutenir

- La compréhension des principaux processus terrestres (y compris les activités humaines)

- La recherche sur la résilience du système terrestre, les liens entre ses dynamiques complexes et les mécanismes d’autorégulation des systèmes vivants (mise en évidence des « seuils » et des mécanismes de « basculement » quand ces seuils sont franchis).

Lien vers l’article (en anglais) :

http://www.nature.com/nature/journa...

Mis à jour ( Vendredi, 12 Février 2010 20:21 )


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