Environnement Lançonnais

Radiofréquences : pas de risque avéré, mais pas assez d’études selon l’Anses

mercredi 16 octobre 2013 par Alain KALT (retranscription)

Le 15 octobre 2013 par Marine Jobert

Téléphoner 30 minutes par jour pendant 10 ans peut nuire à votre cerveau

L’Anses publie son avis sur les radiofréquences, augmenté des connaissances accumulées depuis trois ans. Rien ne permet de conclure avec certitude que l’exposition aux téléphones portables et autres objets émettant des radiofréquences (de la tablette au baby-phone) soit nocive pour la santé. Mais affirmer le contraire serait imprudent, au vu du manque d’études approfondies disponibles. Entre les partisans du principe de précaution, les opérateurs et le grand public avide de technologies, le débat va continuer.

Caractériser les dangers, déterminer les expositions et enfin évaluer le risque des ondes électromagnétiques sur la santé. Telles ont été les missions des 16 experts[1] qui, pendant deux ans, ont analysé près de 300 études publiées entre le 1er avril 2009 et le 31 décembre 2012. Cette expertise, qui couvre évidemment les téléphones portables, mais aussi tous les appareils émettant des radiofréquences comprises entre 8,3 kHz et 6 GHz (TV, radio, télécommunications, baby-phones, téléphones sans fil, tablettes tactiles, etc.), a permis à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) de réactualiser son avis sur ce sujet sensible, qui a été dévoilé ce matin. En substance, l’agence ne conclut pas à des « effets sanitaires avérés » et ne propose donc pas de « nouvelles valeurs-limites d’exposition pour la population générale ».

L’Anses relève néanmoins que certaines publications évoquent « une possible augmentation du risque de tumeur cérébrale, sur le long terme, pour les utilisateurs intensifs de téléphones mobiless », s’inscrivant dans le droit fil du classement en 2011 par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) des radiofréquences comme « possiblement cancérogènes » pour les gros utilisateurs. « Cela représente 30 à 40 minutes par jour pendant 10 ans », détaille Olivier Merckel, chef de l’unité d’évaluation des risques liés aux agents physiques de l’Anses. « Mais il n’y a pas de lien de cause à effet établi, précise le scientifique. C’est une association statistique qu’on n’explique pas biologiquement. »

Des mécanismes de cancérogenèse sont-ils à l’œuvre ? « On ne peut pas exclure le fait que, dans certaines conditions, les radiofréquences puissent favoriser l’oxydation de l’ADN (…) et induisent des cassures de l’ADN, [qui] semblent être rapidement réparées. Elles sont vraisemblablement sans conséquence pour l’intégrité des chromosomes », écrivent les scientifiques. L’expertise fait également apparaître, « avec des niveaux de preuve limités », différents effets biologiques chez l’homme ou chez l’animal (sommeil, fertilité mâle ou performances cognitives). Néanmoins, les experts de l’agence « n’ont pu établir un lien de causalité entre les effets biologiques décrits sur des modèles cellulaires, animaux ou chez l’homme et d’éventuels effets sanitaires qui en résulteraient ».

Manque d’études

L’Anses note toutefois que l’évaluation des risques « ne peut être conduite à ce jour pour différents effets potentiels en l’absence de données disponibles chez l’homme ou chez l’animal et que l’impact potentiel des protocoles de communication mis en œuvre (2G, 3G, 4G) apparaît faiblement documenté ». Parmi les études les plus frappantes de cette expertise figurent… celles qui n’existent pas (encore) car, tant les déploiements technologiques que les champs de recherche investigués sont en décalage avec la réalité du terrain. Exemple : « La littérature scientifique est surtout abondante pour les expositions aux signaux GSM ou UMTS caractéristiques de la téléphonie mobile », note l’agence. Ce qui laisse dans le flou quantité d’expositions à d’autres appareils émettant également des radiofréquences.

« Il faut effectivement augmenter le corpus de connaissances », détaille Olivier Merckel -lequel rappelle que, pour que les experts s’intéressent à tel ou tel effet, « il faut qu’il soit au minium documenté quelque part. Il y a certains effets pour lesquels il n’y a qu’une étude, on ne peut donc rien conclure ». Et de pointer la dispersion qui existe dans les champs des études menées. « Tel laboratoire s’intéresse à la 2G sur telle fréquence, un autre à la 3G sur telle autre fréquence… ce qui est dommage car, à l’heure actuelle, les connaissances ne nous permettent pas, par exemple, de distinguer entre les effets des signaux 2 G et ceux des signaux 3G ou 4G. »

Dans cet esprit, l’agence pointe des lacunes méthodologiques, un manque d’études à long terme et une grande disparité dans les recherches menées sur les effets biologiques et sanitaires (en matière de modèles expérimentaux testés, de systèmes et niveaux d’exposition, de types de signaux utilisés, etc.)… Elle recommande donc de « favoriser la cohérence des études à conduire, via une réflexion au niveau international visant à définir les lignes directrices d’une recherche coordonnée, en tenant compte des acquis, des incertitudes et des lacunes de connaissance ». C’est l’un des effets que cherchent à corriger les appels à projet de recherche lancés par l’Anses. Le dernier en date, cet été, portait sur l’électrosensibilité.

Recommandations

Sur le volet recommandations, l’Anses s’intéresse particulièrement aux adultes qui utilisent intensément leur téléphone pour converser en leur conseillant d’user du kit mains-libres ; et aux enfants, qui sont incités à « un usage modéré du téléphone mobile ». Elle préconise également que le niveau d’exposition maximal engendré (DAS[2] par exemple) soit désormais affiché pour tous les dispositifs courants émetteurs de champs électromagnétiques destinés à être utilisés près du corps (téléphones DECT, tablettes tactiles, veille-bébé, etc.), comme c’est déjà le cas pour les téléphones portables.

Appliquer le principe de précaution

« Heureusement, l’agence réitère ses recommandations de réduction des expositions », note Sophie Pelletier, du collectif des électrosensibles de France[3]. « Mais tout en disant que les études montrent des effets sanitaires, l’Anses adopte une position frileuse, car elle considère que, puisque la science ne sait pas les qualifier de manière certaine, on est dans une situation d’incertitude. Pourtant les risques sont potentiellement importants, et vu l’ampleur de la population exposée et le déploiement important et précoce des radiofréquences, les pouvoirs publics doivent nous appliquer le principe de précaution en prenant des mesures de réduction des expositions. »


[1] Des experts issus de disciplines aussi diverses que la métrologie et la dosimétrie des champs électromagnétiques, l’épidémiologie, la médecine, la biologie ou encore les sciences humaines et sociales.

[2] Débit d’absorption spécifique.

[3] Le sujet de l’hypersensibilité fera l’objet de la publication d’un rapport spécifique du groupe de travail d’experts « radiofréquences et santé », dont les travaux seront lancés dès la fin de cette année.

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